TOUT EST DIT

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samedi 19 novembre 2011

Henri Guaino en campagne pour défendre "l’exception française"

Le théâtre de Saint-Quentin (Yvelines), qui compte 600 places, était bien rempli lorsque Henri Guaino y a fait son entrée vendredi 18 novembre au soir avec une bonne heure de retard. Le conseiller spécial du président de la République a un problème d'horloge.

Depuis qu'il s'est mis en tête de sillonner la France parce que, dit-il, "je n'entend pas ce que j'ai envie d'entendre dans cette campagne", c'est chaque fois le même scénario : une à deux heures de retard liées à cette angoisse du discours qu'il veut écrire et réécrire sur le modèle qu'affectionnait feu son mentor Philippe Séguin : des mots ciselés dans des phrasés longs. Parce que la politique, pour les séguinistes, c'est d'abord cela : du verbe, un ton, une dramaturgie , des retours historiques et de grands mots, comme "l'Etat, la Nation la République", qui au bout du compte fondent l'"exception française". Henri Guaino se fait fort de les défendre et de la défendre , dusse-t- il être le dernier des Mohicans.
"IL FAUT CHOISIR SON CAMP"
Vendredi soir, c'était donc soirée nostalgie à Saint-Quentin, où le maire Xavier Bertrand l'avait prié de s'exprimer. Quarante minutes d'éloge républicain, ponctuées de  mises en garde : la démocratie court un grand danger à considérer la crise de la dette par le petit bout de la lorgnette alors que  c'est tout "une politique de civilisation" qu'il faut conduire. Le concept, lancé par le même Guaino en janvier 2008 pour tenter de donner du sens au début de quinquennat très "bling-bling" de Nicolas Sarkozy, avait fait long feu, faute de contenu. Mais, soutient- il aujourd'hui, la crise change tout : "Il faut choisir son camp, choisir contre quoi et pour quoi nous nous battons."
Henri Guaino a choisi : il est pour libérer le travail et taxer le capital, contre repousser à 67 ans l'âge de la retraite ("ce n'est pas l'urgence"), récuse toute coupe dans les dépenses sociales et se refuse à faire du chômeur le bouc émissaire de la crise. Le discours, décliné d'un ton monocorde, n'a cependant pas la puissance de feu de celui d'un Séguin qui naguère avait trouvé en Edouard Balladur son meilleur ennemi.
Henri Guaino est conseiller spécial de l'Elysée. Donc sous contrainte. Il se doit d'éviter de décocher des flèches à droite et vante sans réserve le bilan de Nicolas Sarkozy. Du coup c'est François Hollande qui prend plein pot. Henri Guaino fustige, comme Xavier Bertrand, l'accord conclu avec les Verts sur le nucléaire et compare le candidat socialiste à Guy Mollet, "cet honnête homme qui eut le malheur de se trouver confronté à des événements qui le dépassaient".
CRAINTE DE VOIR LA CAMPAGNE DÉRIVER
En public, Henri Guaino en reste là. Il épargne son camp, tait sa crainte de voir la campagne dériver, comme au moment du discours de Grenoble par excès de zèle de Patrick Buisson, l'un des conseillers écoutés de Nicolas Sarkozy, qui vient des rangs de l'extrême droite. Il ne dit rien des frissons que lui inspire la rigueur vantée par François Fillon, autre séguiniste notoire ("Comme si le peuple était coupable ! Comme si cela ne faisait pas trente ans qu'il souffre !"), mais tout cela évidemment pèse dans sa démarche .
Les militants et sympathisants UMP de Saint-Quentin qui, à vue de nez, comptent beaucoup de retraités et peu de jeunes, l'ont écouté dans un silence total puis l'ont applaudi juste ce qu'il faut avant de demander le texte écrit. Xavier Bertrand, qui connaît bien la pudeur de sa ville, jure que les spectateurs étaient satisfaits et rappelle cette anecdote. "Quand Louis Jouvet commençait une pièce, il la jouait toujours à Saint-Quentin, parce qu'il savait que si ça plaisait là, ça plairait partout."
Françoise Fressoz

Les syndicats appellent à une journée de mobilisation le 13 décembre

L'intersyndicale a appelé vendredi 18 novembre à une "journée nationale de mobilisation interprofessionnelle, notamment avec des rassemblements" le 13 décembre, pour protester contre les plans d'austérité du gouvernement. Réunis au siège de la CGT à Montreuil, en Seine-Saint-Denis, cinq syndicats (CGT, CFDT, FSU, Solidaires et UNSA) ont également lancé un "appel commun" aux salariés pour "interpeller le gouvernement, les élus et les responsables d'entreprises dans la période du 1er au 15 décembre".

Dans leur communiqué commun, les cinq confédérations déplorent que "le gouvernement décide de mesures dans le domaine social sans rencontrer ni entendre les organisations syndicales". "Il fait porter les efforts sur les salariés, ce qui creuse les inégalités et plonge des milliers de familles dans les difficultés sociales", ajoute le texte.
FORCE OUVRIÈRE NE SIGNERA PAS L'APPEL
Force ouvrière (FO), qui participait pour la première fois depuis deux ans à cette intersyndicale, a indiqué qu'elle ne signerait pas cet appel commun mais s'associerait à la journée du 13 décembre. La centrale de Jean-Claude Mailly revendiquera, dans le cadre de cette journée, un appel à la grève, option qui n'a pas été retenue par les autres organisations.
L'intersyndicale a prévu de se réunir à nouveau le 15 décembre, afin de "tirer le bilan" de la journée du 13 décembre et d'envisager "de nouvelles initiatives en janvier".
Du crétinisme, ils en ont fait un art !!!

Ce qui fait fuir les millionnaires

Il se passe quelque chose d'étrange chez les millionnaires chinois. Alors que le monde entier a les yeux rivés sur la Chine, dont la prodigieuse ascension économique depuis trente ans exerce, à juste titre, une fascination sans bornes sur nos cerveaux engourdis par des statistiques anémiques, les nouveaux riches de l'empire du Milieu ne pensent qu'à une chose : nous rejoindre.

C'est du moins ce que nous laisse entendre une étude publiée début novembre par la Bank of China et le Hurun Report, qui publie chaque année à Pékin la liste des Chinois les plus riches. Les enquêteurs ont sondé 980 millionnaires, tous à la tête d'un patrimoine supérieur à 10 millions de yuans, soit l'équivalent de 1,1 million d'euros. Plus de la moitié d'entre eux ont indiqué qu'ils songeaient à émigrer (46 %), ou bien qu'ils l'avaient déjà fait ou étaient sur le point de le faire (14 %). Il n'est, bien sûr, pas interdit de penser que si la Bank of China réalisait la même enquête en France, elle découvrirait quelques millionnaires français désireux d'émigrer en Suisse, en Belgique ou à Monaco... pour des raisons que l'on devine sans peine.

Les motivations des riches chinois sont différentes. Ce n'est pas le fisc qui les fait fuir, mais l'inadéquation de la qualité de la vie et de l'environnement social aux attentes générées par leurs moyens financiers. Les fruits d'un taux de croissance du PIB encore supérieur, en 2011, à 9 % peuvent être inégaux, mais les enfants des riches respirent le même air pollué que les enfants des pauvres, et les millions que gagnent les parents des premiers n'y changent rien. La politique de l'enfant unique s'applique aussi aux riches, et les exemptions dont ils ont pu jouir en se contentant de payer des amendes sont devenues plus difficiles à obtenir. Parmi les autres facteurs qui incitent au départ les millionnaires sondés, on retiendra la rigidité du système éducatif, les insuffisances du système de santé et l'absence de cadre juridique solide.
Invité par un journal économique chinois à commenter cette enquête - qui confirme une tendance déjà révélée il y a quelques mois -, un universitaire de Tsinghua, Cai Jiming, a, lui, mis l'accent sur l'insécurité. "Avons-nous vraiment installé l'idée que la propriété privée est sacrée et inviolable ?, demande-t-il. Ces dernières années, nous avons assisté à l'expropriation illégale de terrains, à la démolition brutale de maisons individuelles et à d'autres phénomènes qui montrent que ces principes ne sont pas encore respectés." Ces principes, lorsqu'ils sont gravés dans la loi, font partie de ce que l'on appelle l'Etat de droit.
Il n'y a pas, en Chine, d'Etat de droit digne de ce nom, et cela perturbe les millionnaires. Où vont donc ceux qui choisissent de partir ? Par ordre de préférence, aux Etats-Unis, au Canada, à Singapour et en Europe, où ils placent leur argent, achètent de l'immobilier et inscrivent leurs enfants à l'université. Sans, pour autant, rompre les ponts complètement avec leur pays : un pied dedans, un pied dehors.
Président d'une grande puissance dont on déplore aussi abondamment le déclin que l'on célèbre l'ascension de la Chine, Barack Obama achève une tournée de neuf jours en Asie et dans le Pacifique. Sa secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, a décrété dans un article très remarqué, publié par Foreign Policy, que, si le XXe siècle a été le siècle de l'Atlantique, le XXIe serait celui du Pacifique.
D'Honolulu, où il a reçu ses partenaires du Forum de coopération économique Asie-Pacifique et lancé un accord de libre-échange transpacifique, M. Obama s'est rendu en Australie, où il a annoncé le déploiement futur de 2 000 Marines, puis à Bali, où il est le premier président américain à participer au sommet de l'Asie orientale. Ce n'est un mystère pour personne : les Etats-Unis renforcent leur présence dans la région parce qu'un géant, la Chine, s'y est levé et qu'il faut y contrebalancer son influence.
Si l'Amérique est de retour en Asie, c'est aussi parce que plusieurs pays de la région le lui demandent. Appelons cela le paradoxe asiatique : le premier partenaire commercial du Japon, aujourd'hui, n'est pas les Etats-Unis mais la Chine. Le premier partenaire commercial de l'Inde, c'est la Chine, de même que celui de la Corée du Sud et de Taïwan. Très soucieux de profiter du boom chinois, tous ces pays - et le Vietnam n'est pas le dernier - sont tout aussi soucieux de ne pas succomber aux ambitions géostratégiques, supposées ou déclarées, de Pékin. C'est donc au grand frère américain qu'ils demandent d'assurer la sécurité, notamment maritime, dans la région.
Cette rivalité apparente peut paraître digne des plus beaux jours de la guerre froide, qui opposait le bloc soviétique au bloc occidental. Il y a, pourtant, outre la Chine, de nouveaux acteurs dans la région, l'Inde, l'Indonésie, pour ne citer qu'elles. Mais ces acteurs ne veulent pas faire partie d'un bloc. Et il n'y a pas, pour l'instant, de bloc chinois : qui, à part la Corée du Nord, y serait d'ailleurs candidat ? Même la secrète Birmanie est en train de s'émanciper du giron de Pékin, au point qu'Hillary Clinton vient de décider d'y faire, le mois prochain, une visite - qui s'annonce historique.
Pourquoi, malgré tous ses efforts de soft power, la Chine a-t-elle si peu d'amis ? L'ouverture de centaines d'instituts Confucius à travers le monde n'y change rien : les millionnaires ont fourni la réponse. Un milliardaire d'Hongkong qui investit beaucoup en Chine continentale, Ronnie Chan, président de l'empire immobilier Hang Lung Properties, a écrit une très intéressante tribune dans le Financial Times du 15 novembre. Il y explique que l'Occident est aujourd'hui menacé pour avoir laissé la liberté s'exercer sans contrôle. La Chine, dit-il, est encore "trop restrictive", mais elle va dans le bon sens. Pour les deux géants, "la question n'est pas s'il doit y avoir de la liberté, mais combien de liberté".
Le problème, c'est que de même qu'on ne peut pas être à moitié enceinte, il est difficile d'être à moitié libre. Et, tant qu'ils ne seront qu'à moitié libres, les millionnaires chinois continueront à voter avec leurs pieds. Et les Etats-Unis à s'imaginer en puissance du Pacifique.

Qu'il est long le chemin de Damas

Est-ce que ça va enfin s'accélérer ? Est-ce qu'enfin on va cesser de s'agiter pour dire qu'il est temps d'agir, comme l'a souligné hier à son tour François Fillon à l'issue de son entretien avec Vladimir Poutine. Lequel exhorte toujours à la « retenue » vis-à-vis du pouvoir syrien. Il en serait drôle Poutine, s'il ne nous avait déjà habitués à se soucier comme d'une guigne du sang versé. Hier, encore des morts et des tirs sur le peuple syrien. Les militaires dissidents retournent leur feu contre leurs frères d'armes du début de la crise. Il est plus que temps d'agir. On peut être Français, ne pas être atlantiste et dire que les États-Unis et Israël ont raison, depuis des années, de surveiller de près Bachar al-Assad. On eût certes préféré que les grands mots d'aujourd'hui eussent été prononcés avant, déjà sous le règne du père. On eût encore préféré, mais on commence à en avoir l'habitude, que le sanguinaire qui se révèle au grand jour n'eût jamais été reçu en France avec les honneurs. Mais il n'était pas le premier du genre. Et Nicolas Sarkozy n'a pas de leçon à recevoir des socialistes en ce domaine qui, autrefois, ont eu d'identiques égards pour d'identiques bouchers. Au lieu de tortiller son derrière en faisant mine de craindre une guerre civile qui a déjà commencé ; au lieu de dire qu'il faut que l'ONU se décide ; au lieu de se réfugier derrière la Ligue arabe : il est temps d'agir. Tout court. Et de soutenir par tous les moyens un peuple qui souffre. Puisque tous les moyens sont employés pour le faire taire.
Est-ce que ça va enfin s'accélérer ? Est-ce qu'enfin on va cesser de s'agiter pour dire qu'il est temps d'agir, comme l'a souligné hier à son tour François Fillon à l'issue de son entretien avec Vladimir Poutine. Lequel exhorte toujours à la « retenue » vis-à-vis du pouvoir syrien. Il en serait drôle Poutine, s'il ne nous avait déjà habitués à se soucier comme d'une guigne du sang versé. Hier, encore des morts et des tirs sur le peuple syrien. Les militaires dissidents retournent leur feu contre leurs frères d'armes du début de la crise. Il est plus que temps d'agir. On peut être Français, ne pas être atlantiste et dire que les États-Unis et Israël ont raison, depuis des années, de surveiller de près Bachar al-Assad. On eût certes préféré que les grands mots d'aujourd'hui eussent été prononcés avant, déjà sous le règne du père. On eût encore préféré, mais on commence à en avoir l'habitude, que le sanguinaire qui se révèle au grand jour n'eût jamais été reçu en France avec les honneurs. Mais il n'était pas le premier du genre. Et Nicolas Sarkozy n'a pas de leçon à recevoir des socialistes en ce domaine qui, autrefois, ont eu d'identiques égards pour d'identiques bouchers. Au lieu de tortiller son derrière en faisant mine de craindre une guerre civile qui a déjà commencé ; au lieu de dire qu'il faut que l'ONU se décide ; au lieu de se réfugier derrière la Ligue arabe : il est temps d'agir. Tout court. Et de soutenir par tous les moyens un peuple qui souffre. Puisque tous les moyens sont employés pour le faire taire.

Et si l'Allemagne n'était pas si exemplaire...

Maintenant l'Europe parle allemand." Maladroit, choquant, le propos du président du groupe parlementaire CDU-CSU, Volker Kauder, au Bundestag, mardi 15 novembre, n'a pourtant fait qu'illustrer le statut que l'Allemagne a officieusement acquis ces derniers mois.

Ce sont les marchés qui l'ont consacrée. Mais aussi l'opinion publique. Désormais, la chancelière allemande, Angela Merkel, peut faire la leçon et imposer ses vues pour résoudre la "pire crise depuis l'après guerre" de l'Union monétaire. Mythe ou réalité ?
Membre du club très fermé des pays notés AAA (l'équivalent d'un 20/20) par les agences de notation, le pays revêt à première vue toutes les qualités - ou presque - dont peut rêver un chef d'Etat. Un déficit public en baisse que le Fonds monétaire international (FMI) voit à moins de 1,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2011. Un stock de dettes, certes élevé à 82,6 % du PIB, mais sur la pente descendante. Un chômage contenu à 6 % de la population active (contre 9,5 % prévu en France). Et, enfin, une balance des paiements courants excédentaire.
Mais, aux yeux des experts, Berlin n'est pas si exemplaire. "Son déficit est honteusement truqué !", dénonce Sylvain Broyer, économiste chez Natixis. Et de développer : après le choc de 2008, le pays a eu recours à une tactique légale, mais peu éthique, pour comptabiliser les dizaines de milliards d'euros déboursés (ou offerts en garanties) afin de relancer son économie et sauver son secteur financier.
Les sommes, poursuit M. Broyer, ont été logées dans un fonds spécial "Sondervermögen" qui a contribué à faire grossir la dette mais n'est pas pris en compte dans le calcul du déficit public. Sans cette astuce le déficit allemand en 2009 n'aurait pas été de 3,2 % mais de 5,1 %, calcule Natixis. Un niveau comparable à celui de la France... De quoi faire écho aux propos de Jean-Claude Juncker, le président luxembourgeois de l'Eurogroupe. "En Allemagne, on fait souvent comme si le pays n'avait aucun problème, comme si l'Allemagne était exempte de dettes tandis que tous les autres auraient des dettes excessives", a-t-il lâché récemment. Une contre-vérité à ses yeux : "L'Allemagne a une dette plus élevée que celle de l'Espagne. Seulement personne ne veut le savoir ici."
RALENTISSEMENT
De fait, selon la Commission européenne, si l'on regarde le ratio dette sur PIB, l'Allemagne fait moins bien que neuf autres pays de la zone euro. Et malgré des recettes fiscales en forte hausse (de 40 milliards d'euros) en 2011 grâce à une croissance dynamique, la dette publique devrait croître, en valeur absolue, cette année de 25 milliards d'euros. La rigueur allemande serait donc toute relative ? D'influents économistes allemands, de sensibilités différentes, partagent l'avis de M. Juncker.
"Le niveau de la dette allemande est inquiétant, si l'on se projette dans l'avenir", juge Henrik Enderlein, dirigeant de la Hertie School of governance. Le déclin démographique du pays, qui contribue à modérer le taux de chômage, se traduira par "une baisse massive des recettes du gouvernement", explique-t-il. Dans le même temps, le vieillissement de la population va faire exploser les coûts de la sécurité sociale et de l'assurance-maladie". En 2010 une étude de la Banque des règlements internationaux (BRI) chiffrait d'ailleurs l'explosion des dépenses de santé en Allemagne à 10 % du PIB en 2035...
"La dette est bien au-dessus des 60 % prévus par le traité de Maastricht. L'Allemagne non plus n'a pas rempli sa tache", déplore Hans-Werner Sinn. Le très influent président de l'Ifo poursuit : "L'endettement déjà élevé montre que l'Allemagne ne peut sauver personne sans perdre elle-même sa notation." Autrement dit, le pays ne serait pas à l'abri, lui non plus, d'une dégradation qui le verrait perdre, un jour, son "AAA", sésame pour emprunter à bon compte sur les marchés financiers. A travers sa participation au Fonds européen de stabilité financière, censé sauver les pays en déroute de l'Union monétaire, "l'Allemagne a déjà mis sa note gravement en danger. Les primes d'assurances sur les emprunts à dix ans de l'Etat allemand ont décuplé par rapport à ce qu'ils étaient avant la crise", précise l'économiste eurosceptique.
Jochen Möbert, économiste à la Deutsche Bank , évoque "trois risques (qui) pourraient menacer la note allemande : une récession, une aide accrue aux pays périphériques et une aversion des marchés pour les emprunts d'Etat". L'Allemagne n'est pas menacée de récession. Mais, comme l'ensemble de la zone euro, elle est promise à un ralentissement en 2012 : les experts tablent sur une croissance de 0,9 % l'an prochain contre 3 % en 2011.
Pour l'heure, les marchés, qui désormais n'hésitent plus à s'attaquer à la Belgique ou à la France, réservent à l'Allemagne un traitement de faveur. Dans la zone euro, d'ailleurs, c'est Berlin qui doit débourser le taux d'intérêt le plus faible pour emprunter.
Mais le "modèle de stabilité allemand", hérité en grande partie des réformes structurelles (marché du travail, système des retraites) menées sous le gouvernement Schröder, soit bien avant la crise, n'est pas non plus un rempart imprenable. A en croire les économistes en tout cas.

Les riches Grecs font fructifier leurs bas de laine à l'étranger

Des particuliers aisés aux grands fortunes, les Grecs sont de plus en plus nombreux à placer leurs capitaux dans l'immobilier parisien ou dans des coffres-forts suisses, craignant une sortie du pays de la zone euro.

Depuis l'ouverture de son cabinet d'avocats franco-hellénique en 1996, jamais Georgia Kouvela-Piquet n'a été autant sollicitée. «Chaque semaine, je reçois deux à trois demandes concernant des investissements en France.» Ces sollicitations proviennent directement de Grèce. Elle émanent tantôt de particuliers «disposant de 500.000 euros» à investir dans l'Hexagone, parfois à de très riches hommes d'affaires, dont la fortune va «de 20 millions à 500 millions d'euros», précise cette avocate parisienne. D'après elle, 80% de ces requêtes concernent l'acquisition de biens immobiliers, très largement «à Paris ou sur la Côte d'Azur». Certains veulent mettre leurs économies dans un petit appartement pour le louer. D'autres, bien plus fortunés, disposent déjà d'actifs et souhaitent notamment se renforcer dans des immeubles de bureaux. Mais quel que soit le montant de leurs investissements, ces Grecs ont tous le même objectif: sécuriser leurs bas de laine. Avec en épouvantail, la possible faillite de la Grèce et une sortie du pays de la zone euro.
D'après Georgia Kouvela-Piquet, le phénomène a débuté dès la fin de l'été 2010, et s'exacerbe à mesure qu'Athènes s'enfonce dans la crise. En guise de baromètre, elle cite le fait que certains de ses clients lui demandent parfois «d'envoyer [ses] notes d'honoraires au plus vite», craignant de ne plus pouvoir les honorer dans un futur proche. En quête d'un placement immédiat, certains «viennent même pour la première fois en France pour me rencontrer», renchérit l'avocate.

La pierre londonienne en valeur refuge

Aux yeux de ces investisseurs, pas question de mettre ses oeufs dans le même panier, surtout à l'heure où le spectre d'une contagion de la crise a franchi un nouveau cap avec les récents déboires économiques de l'Italie. D'après notre avocate, nombre de ses clients ciblent ainsi différentes capitales européennes. Si la pierre française a la cote, l'anglaise n'a ainsi rien à lui envier: pour Richard Barber, qui travaille à l'agence londonienne huppée W. A. Ellis, les Grecs sont de plus en plus nombreux à investir dans la capitale britannique. Selon lui, ils auraient dépensé 250 millions de livres sur les douze derniers mois pour acquérir des propriétés de haut standing.
Autre point de chute privilégié pour les capitaux helléniques: la Suisse, dont le franc semble jouer à plein son rôle de valeur refuge. Sous le gouvernement de l'ex-premier ministre grec Georges Papandréou, Dimitris Kouselas, alors secrétaire d'État au ministère des Finances, avait évalué à «280 milliards d'euros, soit 120% du PIB grec» les fonds de ses concitoyens dans les banques helvètes. Au total, selon le quotidien allemand Handelsblatt, pas moins de 560 milliards d'euros auraient été placés sur des comptes bancaires étrangers depuis le début la crise. Soit, en résumé, près du double de la dette d'Athènes.

«Perte de confiance»

Ces fonds appartiennent majoritairement aux grandes familles d'armateurs, de magnats du pétrole, du tourisme ou encore de la construction. Figure de proue de ces clans richissimes, les Latsis, première fortune grecque, résident à Genève. Elle pèserait à elle-seule quelques 3,38 milliards d'euros, selon le magazine Greek Rich List, l'équivalent de Forbes à l'échelle hellénique. Pour Savvas Pavlou, son directeur de publication, cette fuite des capitaux est à mettre sur le compte de l'«incertitude» couplée à la «perte de confiance» dans l'économie nationale, gangrenée par «une culture de la fraude et de la corruption». Conséquence: «chacun met son capital où il est le mieux traité», cingle-t-il.
Problème: ces riches familles constituent «l'épine dorsale» du tissu économique grec, poursuit Savvas Pavlou. «Leur désaffection pèse sur les investissements locaux», abonde Céline Antonin, économiste à l'OFCE et spécialiste de la Grèce. «Or ceux-ci constituent un des moteurs de la croissance», poursuit-elle, rappelant que le PIB du pays a encore plongé de plus de 5% au troisième trimestre 2011.

Dette : les taux d'intérêt que paient réellement les États

INFOGRAPHIE - Les taux d'intérêt sur les dettes des pays de la zone euro s'envolent à mesure que les marchés paniquent. Mais les taux qui flambent ne sont pas ceux réellement payés à l'heure actuelle par les États.

Ces derniers mois, les investisseurs réclament de l'Italie, de l'Espagne ou même de la France des intérêts toujours plus élevés. Le signe de la défiance des marchés : le taux reflète le risque estimé par les banques. Ainsi, la différence entre le taux d'intérêt français et allemand, qui fait office de référence, a battu des records historiques cette semaine, Berlin empruntant quasiment deux fois moins cher que Paris. Toutefois, les taux qui flambent ne sont pas ceux réellement payés à l'heure actuelle par les États. Même s'ils sont de très mauvais augure à moyen terme.
Avant que la situation ne se dégrade, la France comme l'Italie se sont endettées à bon compte et les intérêts versés par ces deux États sont substantiellement inférieurs à ceux observés aujourd'hui sur le marché. La France paye en moyenne un taux d'intérêt de 2,02% sur sa dette à moyen et long terme (taux pondéré, en octobre), selon l'Agence France Trésor (AFT) qui gère la dette publique. Un chiffre bien inférieur à la moyenne de 4,15% observée avant crise, sur la période 1998 et 2007.
Pour comprendre cette différence, il faut se pencher sur le mécanisme des emprunts publics. Pour combler leur déficit ou refinancer leur dette, les pays de la zone euro empruntent auprès des banques et autres grands investisseurs (fonds de pension, assureurs, etc.). Ces derniers achètent aux États des titres de dette appelés «obligations». Ces instruments financiers peuvent être ensuite échangés sur les marchés, dit «obligataires», sur lesquels les taux d'intérêts évoluent au jour le jour en fonction de l'offre et de la demande.
Si beaucoup d'investisseurs veulent acheter, c'est le cas de l'Allemagne, ils baissent. Si beaucoup veulent vendre, comme dans le cas de l'Italie, les taux montent. À ce stade, les variations ne concernent pas directement les pays emprunteurs, mais elles détermineront les taux lors des émissions de nouvelles obligations.

«Pas de niveau magique»

La flambée actuelle des taux d'intérêt d'État sur les marchés obligataires va forcément augmenter le coût du crédit pour les États visés, notamment pour la France. Jusqu'où les États visés peuvent-ils tenir? «Il n'y a pas de niveau magique : cela dépend à la fois de l'endettement du pays, des intérêts actuellement payés et de la croissance, donc des rentrées fiscales», décrypte Gianluca Ziglio, stratégiste pour UBS.
La résistance d'un pays dépend également des sommes qu'il doit emprunter sur les prochains mois. L'Italie doit ainsi trouver 250 milliards d'euros en 2012 et la France, 179 milliards. L'Italie pourrait supporter un taux d'environ 7% sur des obligations à 10 ans, selon la Banque centrale du pays, sans voir sa dette exploser. La France pourrait supporter un coût du crédit du même ordre. Pendant quelques mois.
«Ce qui compte au final, c'est la période durant laquelle le taux reste élevé, souligne Dominique Barbet, économiste chez BNP Paribas. S'il existe un espoir de baisse des taux dans le futur proche, alors cela vaut le coup de faire le dos rond quelques temps. Au-delà de plusieurs mois, cela devient plus difficile.»

L'Europe pour la prospérité

« Ce n'est pas seulement l'Union européenne qui est en péril, mais aussi la civilisation dont elle est porteuse », écrivait le philosophe Yves-Charles Zarka dans Le Monde de vendredi dernier. C'est dire la gravité des heures que nous vivons actuellement.

Ces paroles faisaient écho à ce qu'avait déclaré Madame Merkel au congrès de son parti, la CDU : « L'Europe vit peut-être ses heures les plus difficiles depuis 1945... Il faut parfaire la structure de l'Union européenne. Cela signifie : non pas moins d'Europe, mais plus d'Europe ». De son côté, le président de la République française, à l'issue des cérémonies du 11 Novembre, répondait à une question sur le même sujet : « Oui, je suis inquiet pour l'Europe. »

C'est donc d'une remise en question générale qu'il s'agit. Apparaissent les faiblesses, les défauts, les contradictions qui fragilisent cette construction européenne pourtant jugée indispensable. En effet, aucun de ses membres ne peut désormais envisager de faire cavalier seul dans un monde qui a tellement changé et qui évolue si vite.

Dans les années 1950, la population mondiale s'élevait à quelque 2,5 milliards. Aujourd'hui, nous en sommes à 7 milliards, presque trois fois plus. Quand la communauté européenne a été créée, les Européens représentaient 20 % de la population mondiale, aujourd'hui à peine 7 %. C'est cela et beaucoup d'autres choses encore qui poussent la Chancelière allemande à affirmer avec force : « L'engagement européen n'est pas seulement un choix, mais un devoir... Le génération actuelle est confrontée à une mise à l'épreuve historique... Il s'agit de montrer que l'Europe peut prendre le tournant. Le devoir de notre génération est de compléter l'union économique et monétaire et de construire une union politique en Europe, étape par étape. » Quant à Nicolas Sarkozy, il estime que l'Europe est « un héritage que nous n'avons pas le droit de dilapider... L'Europe est un acquis que l'on doit défendre... Je défendrai cette Europe de toutes mes forces. Il n'y a pas d'autre choix ! »

Par-delà les rivalités électorales

En ce qui concerne la France et l'Allemagne, il y a deux solutions, rappelait M. Sarkozy, « la convergence et la paix, ou la divergence et le risque d'affrontement ». Il est donc urgent que les deux pays s'accordent le plus possible, le plus vite possible. Madame Merkel a fait des avances et des propositions concrètes : interdiction et contrôle des déficits publics, élection au suffrage universel du président de la Commission. « Entre discipline à l'allemande et solidarité française, un accord pourrait se dessiner », écrit Éric Leboucher (1).

Mais par-delà les si graves problèmes financiers actuels, par-delà les réformes de structures indispensables, il est urgent de trouver le moyen de mobiliser les peuples de l'Europe pour que ceux-ci se sentent davantage concernés. Le déficit démocratique en ce domaine pourrait entraîner une désaffection, une sorte d'indifférence qui, à terme, pourrait vider l'Europe de sa substance. Celle-ci est apparue trop technocratique, pas assez humaniste, ce qu'elle est pourtant dans sa nature profonde.

Malheureusement, « le projet européen a été le plus souvent conduit loin des peuples », écrit Jean-Marie Guéhenno, ancien Secrétaire général adjoint des Nations Unies (2). Il poursuit : « L'argumentaire européen a été défensif... L'Europe doit être un projet positif. La gravité même de la crise économique est une opportunité. » Et Jean-Marie Guéhenno précise que la solidarité européenne est devenue une nécessité économique « car aucune nation, si prospère soit-elle, ne se sauvera toute seule ».

On dit souvent que l'Europe progresse à travers les crises et les difficultés. Cette fois-ci, la marche à franchir paraît plus haute que jamais. Raison de plus pour prendre un grand élan : il ne s'agit pas seulement « de boucher les trous de la gestion passée mais de construire la prospérité et les emplois de demain » (2).

Voilà ce qui devrait provoquer le sursaut, le rassemblement et l'effort de tous, par-delà même les rivalités électorales. « En France, on aimerait entendre de la gauche des propositions plutôt que de sempiternelles critiques faciles. On aimerait que le PS travaille avec son homologue SPD. On aimerait que l'UMP réponde à la CDU. Pour la France, c'est le moment, comme l'y invite Madame Merkel, de retrouver le sens de l'Histoire » (1).

(1) Les Échos, 18 novembre 2011

(2) Le Monde, 18 novembre 2011

Potion

Il a fumé quoi, Yannick Noah ? Notre champion chanteur avait jadis confié qu’il ne crachait pas, dans les vestiaires d’avant-match, sur la plaisir d’un petit joint (ni d’ailleurs sur d’autres excitants, plus féminins). Mais là, il a dû dépasser la dose, ou noyer de drôles de substances dans son beaujolais nouveau… Que nous dit Noah ? Les Espagnols, qui collectionnent les titres du foot au vélo et du basket au tennis, prendraient tous de la « potion magique ». Ils seraient même tombés dedans, comme Obélix — qui aurait pu commenter : ils sont fous ces Ibères, et rudes… Cela n’est évidemment pas très gentils pour nos voisins. Mais notre Noah national va encore plus loin : il propose carrément de distribuer la potion magique à tout le monde. Nous n’aurions ainsi plus à craindre les Obélix espagnols : tous égaux, puisque tous dopés. Monsieur Noah, s’il-vous-plaît, passez à l’eau claire…

Exaspérations

« L’Europe parle allemand », s’est félicité le président du groupe parlementaire chrétien-démocrate. Une façon peu diplomatique de dire que la zone euro se plie désormais à la rigueur allemande synonyme de bonne gestion.

Ce ton péremptoire a beaucoup déplu, également outre-Rhin. Mais rien d’étonnant : surtout en France, l’Allemagne est citée en modèle, un modèle sur lequel il faut à tout prix s’aligner pour sortir de la crise.

Pourtant, question « vertu » financière, notre voisin est de loin devancé par les Pays-Bas, la Finlande ou le Luxembourg. Mais seule la championne des exportations importe en faisant de Berlin le « maître d’école ». Et cela commence à exaspérer, tout comme exaspère un lamento aux effets psychologiques désastreux courant dans toutes les couches de la société allemande : l’Europe convoiterait le bas de laine de l’Allemagne amassé à la sueur des réformes, l’Allemagne paierait pour tous. Ce qui est complètement faux. Par exemple, avec 159 milliards, les Français sont autant garants du Fonds européen de stabilité financière FESF que les Allemands à hauteur de 211 milliards… et 20 millions d’habitants de plus que la France.

Malheureusement, la légende a la vie dure. Elle pousse à l’euroscepticisme et à un populisme perceptible jusqu’aux partis gouvernementaux.

Que l’Allemagne soit un modèle pour la finance et les affaires, nul ne le nie. Toutefois, cette médaille a un revers dont ne parlent jamais ceux qui plaident la « convergence » franco-allemande à longueur de discours : la paupérisation gagne chez nos voisins (voir ci-contre), le tissu social se détricote jusqu’à l’assurance-maladie qui glisse vers le « privé » avec des cotisations difficilement accessibles au plus grand nombre.

Mais pour continuer à jouer son rôle politique en Europe, Paris s’accroche à Berlin. Or cette « Merkozy » exaspère aussi, et pas seulement en Grèce ou en Italie. D’autant plus qu’auprès des autres partenaires européens la France passe pour la mouche du coche en essuyant sans broncher les « Nein » de la chancellerie. Et ce encore récemment lors d’une énième tentative pour infléchir la politique de la BCE de Francfort. Le général de Gaulle et François Mitterrand ont dû se retourner dans leur tombe ! L’axe franco-allemand exige un pied d’égalité.

En réalité, bien que le tender France soit rivé à la locomotive Allemagne, les divergences s’accentuent entre les deux pays. Si la crise devait encore s’amplifier, l’attache craquerait. Au grand désespoir de tous.

L'autre file avance-t-elle vraiment plus vite ?

Voilà. Vous avez casé les valises dans le coffre, les enfants dans leurs sièges auto, la crème solaire et les sacs à vomi dans la boîte à gants. Mamie va garder le chien pour les vacances, et vice versa. Vous gagnez la plus proche autoroute et, au bout de dix minutes, tombez dans le premier bouchon. Des milliers de voitures devant, bientôt autant derrière, le tout au ralenti, à l'arrêt ou en accordéon. D'une voix geignarde, votre fille de 5 ans vous serine le rituel : "C'est quand qu'on arrive ?", et, au moment où vous allez lui répondre : "Dans 800 kilomètres....", vous vous apercevez que, comme d'habitude dans les embouteillages, l'autre file avance plus vite que la vôtre.

Au même titre que la calamité du raccourci, qui s'avère toujours le plus long chemin entre deux points, la malédiction de la mauvaise file semble être une loi universelle de la conduite. Mais est-ce justifié ? L'autre voie avance-t-elle vraiment plus vite ? Comme s'en sont aperçus, en 1999, deux chercheurs, Donald Redelmeier (université de Toronto) et Robert Tibshirani (université Stanford, en Californie), à l'occasion d'une étude publiée dans Nature, les données sur ce problème crucial n'existaient alors pas. Pour confirmer ou démolir la loi de l'autre file plus rapide, ils se sont donc livrés à deux expériences.

La première a consisté à simuler sur ordinateur un embouteillage sur une deux-voies. Même si, au départ, toutes les autos avaient les capacités d'accélération et de freinage d'une Honda Accord (triste monde virtuel...), les chercheurs ont ensuite introduit un peu de frisson dans le modèle, un zeste de Porsche, un soupçon de 2 CV, des voitures arrivant dans la circulation avec des écarts aléatoires. Et celles-ci se sont amassées par dizaines puis par centaines sur l'autoroute imaginaire.

Le résultat est surprenant : dès que le bouchon se forme, les deux files évoluent, sur les dix minutes de la simulation, à la même vitesse l'une que l'autre. Par moments, une file ralentit ou s'arrête, puis c'est l'autre qui bloque, mais, au bout du compte, on est dépassé autant que l'on dépasse. Cependant, ces deux phénomènes ne sont pas symétriques dans leur distribution temporelle. Sur les dix minutes, on passe moins de temps à doubler qu'à être doublé. Cela est dû à l'écart entre les voitures. Lorsque celles-ci sont à l'arrêt, pare-chocs contre pare-chocs, les chanceux de la file voisine peuvent en dépasser trois en une seconde. En revanche, comme les automobiles qui roulent sont séparées par une certaine distance, on ne sera jamais dépassé par trois véhicules en une seconde... Dépasser est un plaisir bref, être dépassé une torture longue.

L'impression que l'autre file est plus rapide viendrait donc de cette dissymétrie. Cela a été confirmé par la seconde expérience, au cours de laquelle fut projeté à 120 personnes un film de quatre minutes pris par la fenêtre d'une voiture dans un embouteillage. Bien que, en réalité, la file voisine eût roulé moins vite, 70 % des cobayes estimèrent le contraire et 65 % auraient volontiers changé de voie pour se retrouver... du côté des perdants.

La malédiction de l'autoroute n'est donc qu'une illusion. Toute la question est de savoir si elle explique aussi pourquoi, au supermarché, cela avance toujours plus vite à la caisse d'à côté au moment où votre fille de 5 ans vous dit : "C'est quand qu'on rentre ?"

Pour la CGT, «l'accord sur le nucléaire est irresponsable»

INTERVIEW - Virginie Gensel, patronne de la fédération énergie de la CGT, redoute les conséquences sociales d'une sortie du nucléaire et juge que l'arrêt de l'EPR serait «une folie».

Secrétaire générale de la Fédération nationale mines-énergie de la CGT, revendiquant 60.000 adhérents, Virginie Gensel dénonce, dans une interview au Figaro, l'accord EELV-PS sur le nucléaire. Pour sa part, Bernard Thibault, le secrétaire général de la confédération syndicale, a critiqué vendredi sur BFM Business un mélange «entre les engagements en matière de politique énergétique et les relations des partis pour former des majorités dans les Assemblées».
LE FIGARO. - Que pensez-vous de l'accord conclu entre les Verts et le PS prévoyant la fermeture de 24 réacteurs nucléaires d'ici 2025 ?
Virginie GENSEL. - C'est un accord irresponsable. On ne peut pas faire reposer la politique énergétique, l'avenir industriel de la France, sur des considérations d'échanges de circonscriptions, de marchandage de coin de table. À la CGT, nous souhaitons un débat véritable sur la politique énergétique globale, dont l'avenir du nuclé­aire. Ce sont des questions complexes qui engagent le pays entier, qui ne peuvent pas être discutées juste à quelques-uns, entre appareils.
Avez-vous été consultés par les Verts et le PS ?
Non. Il y a un an, nous avons écrit à tous les partis politiques pour leur faire part de nos propositions en matière d'énergie. Nous avons rencontré les Verts, le Parti de gauche, le PCF, mais ni le PS ni l'UMP ne nous ont répondu.
Qu'est-ce que vous trouvez «irresponsable» dans cet accord ?
Derrière la première intention affichée, réduire le nucléaire, il y a la sortie du nucléaire. Nous sommes favorables au développement des énergies renouvelables, mais elles ne sont pas en capacité, en l'état actuel, de répondre aux besoins. Personne ne fait de réelles propositions pour savoir par quoi on remplacerait le nucléaire. Voyez l'Allemagne, où l'on dit que les énergies renouvelables vont être développées : en attendant, les centrales thermiques sont sollicitées, et l'on augmente tranquillement l'effet de serre.
Redoutez-vous les conséquences sociales d'un arrêt des centrales ?
Oui, bien sûr, mais pas seulement pour ce qui concerne les emplois du nucléaire. Il y a en France, 3 ou 4 millions de foyers en précarité énergétique, c'est-à-dire qui consacrent une part importante de leurs ­revenus à s'éclairer et se chauffer. Si les prix de l'électricité augmentent, qu'en sera-t-il pour eux ? Le prix bas du courant en France est aussi un élément de compétitivité pour notre industrie.
Les effectifs dans le nucléaire font actuellement l'objet d'une incroyable guerre des chiffres. Combien d'emplois sont concernés ?
La filière emploie quelque 125.000 personnes, auxquelles il faut ajouter un chiffre équivalent pour les sous-traitants. Cela fait déjà 250.000 salariés, sans compter plusieurs dizaines de milliers d'emplois indirects. Mais n'opposons pas ces emplois à ceux des renouvelables. Pour les énergies vertes, il s'agit de développer une vraie filière industrielle.
Faut-il poursuivre le chantier de l'EPR à Flamanville ?
Il faut terminer ce projet. Le chantier est aujourd'hui tellement engagé qu'il est impensable de revenir en arrière. Ce serait une folie. L'EPR de Flamanville est un prototype, une tête de série dont il sera très important ensuite d'analyser le retour d'expérience. D'une manière générale, la recherche dans l'énergie, mais également dans le nucléaire, est aujourd'hui insuffisamment poussée. S'agissant de la génération IV des réacteurs, des pays comme la Russie et l'Inde sont en avance par rapport à la France.
À la suite de la catastrophe de Fukushima , le recours à la sous-traitance par EDF a été évoqué par les experts de l'État comme un enjeu de sûreté. Votre position ?
C'est la CGT qui est intervenue en ce sens. Nous sommes pour que des métiers liés à la sûreté soient réinternalisés et pour un statut de haut niveau pour tous les salariés. Nous avons demandé à Éric Besson, le ministre de l'Industrie, d'ouvrir des négociations sur la sous-traitance.

POUR UNE FOIS QUE LA CGT NE DIT PAS DE CONNERIE, PROFITONS EN !!

Nicolas Sarkozy veut étendre les lois contre le piratage au streaming

La loi dite "Hadopi" (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet) est un succès, mais il faut étendre la lutte contre le piratage à la diffusion en continue (streaming) : c'est en substance le message que Nicolas Sarkozy a délivré, vendredi 18 novembre, à Avignon, lors d'un forum sur la culture à l'ère du numérique.

"J'aime une musique, je veux la partager : la démarche n'est pas en soi négative. Mais sur les sites de streaming, l'idéologie du partage, c'est l'idéologie de l'argent : je vole d'un côté et je vends de l'autre. Personne ne peut soutenir cela", a-t-il déclaré, laissant entendre qu'une loi "Hadopi 3" serait une possibilité pour lutter contre les sites diffusant illégalement des contenus, et notamment des films. "J'ai bien conscience que la technologie évolue. Si la technologie nous permet une nouvelle évolution, on adaptera la législation", a-t-il précisé.

En droit, le fait pour l'internaute de regarder une vidéo en streaming, même s'il n'en détient pas les droits, n'est pas en soi illégal. En revanche, les sites qui diffusent des films ou séries sans autorisation sont clairement dans l'illégalité ; des responsables de sites de ce type sont régulièrement interpellés.

Une loi "anti-streaming" pourrait donc prendre deux formes : soit la création d'un nouveau délit permettant de condamner les titulaires d'un accès Internet ayant été utilisé pour consulter ces sites, sur le modèle de l'Hadopi 2 ; soit une forme de filtrage sur le modèle de ce qui existe actuellement pour les sites de jeux d'argent. Contrairement aux réseaux P2P, il est en revanche très difficile de recueillir les adresses IP des utilisateurs de sites de streaming, qui sont pour certains basés à l'étranger et peu enclins à répondre aux réquisitions judiciaires.

Le président de la République s'est également félicité des résultats obtenus jusqu'à présent par la Hadopi, expliquant que grâce à l'action de l'autorité indépendante, "le piratage par P2P a reculé de 35 %". Un chiffre contestable, le chiffre, difficile à mesurer, prenant aussi en compte le passage d'une partie des internautes à d'autres formes de téléchargement illégal.

LA CRÉATION MUSICALE FINANCÉE PAR UNE TAXE SUR LES ABONNEMENTS À INTERNET

Le président de la République a également annoncé qu'un Conseil national de la musique (CNM) serait créé, sur le modèle du Centre national du cinéma (CNC). Un fonds serait alimenté par un prélèvement sur les abonnements à Internet, avec pour finalité de financer la diversité et la création musicale.

Cette annonce coïncide avec la révélation du contenu d'un rapport très sévère de l'inspection des finances sur le fonctionnement du CNC. Il dénonce notamment des frais de fonctionnement disproportionnés, ainsi qu'une politique de subventions confuses et trop généreuse, aboutissant à une situation dans laquelle la majorité des films sont intégralement financés avant même leur sortie en salle.

Dans une tribune au Monde, mercredi, les directeurs de plusieurs fournisseurs d'accès à Internet avaient, a contrario, mis en garde le gouvernement, estimant qu'une politique fiscale "incohérente" nuirait à la fois à l'emploi, à l'innovation et aux consommateurs. "Il faut cesser la fuite en avant qui consiste à augmenter continuellement les taux sur une assiette qui stagne, et surtout qui pèse sur les seuls acteurs français", plaidaient-ils. Sans succès semble-t-il.

Les autres peurs nucléaires


Le Président va s’occuper lui-même des plans sociaux. Ceux qui ne portent pas ce nom mais qui se préparent bel et bien dans les directions de PSA, de la BNP, de la Société générale aujourd’hui, peut-être d’Air France, Areva, Seafrance demain. Mais le Président s’occupe aussi des plans sociaux… que prépare la gauche dans la filière nucléaire. « Le démantèlement causerait des dommages considérables à l’industrie française », avertit le chef de l’État. Au moment où les usines se vident, où la crise financière européenne prend chez nous les visages humains d’ouvriers, de marins et de guichetiers promis à Pôle Emploi, en plein psychodrame entre le PS et les Verts, Nicolas Sarkozy brandit de nouvelles peurs nucléaires : pertes d’emplois, perte d’indépendance, hausse des tarifs. Opportuniste, il monte en première ligne sur le thème déterminant de l’emploi avec une posture protectrice, un discours clair, approuvé par son camp et audible par l’électorat populaire résumé ainsi : une centrale nucléaire, c’est une usine qui ferme. Les plans sociaux du nucléaire sont pour le moment électoralistes, même si un job est déjà menacé : celui de candidate écologiste d’Eva Joly.

La Grèce veut s'imposer encore plus de rigueur en 2012

Le nouveau gouvernement de coalition présente ce vendredi un budget 2012 encore plus austère que prévu. Et ce alors que les objectifs affichés pour 2011 pourraient ne pas être tenus.

Sur le plan de la rigueur, la Grèce veut resserrer sa ceinture d'un cran supplémentaire en 2012. Le gouvernement du nouveau premier ministre, Lucas Papadémos, a revu à la baisse son objectif de déficit pour l'année prochaine, à 5,4% du produit intérieur brut (PIB), après 9% en 2011. L'avant-projet de budget visait initialement une différence entre recettes et dépenses de 6,8%.
«Après une période historique d'augmentation régulière, l'évolution de la dette publique va maintenant s'inverser, a déclaré aux députés le ministre des Finances Evangélos Vénizélos, lors de la présentation du budget. Désormais, la trajectoire est celle d'une réduction de la dette publique pour alléger le fardeau qui pèse sur les épaules des Grecs.» Le budget sera soumis au vote le 7 décembre.
Si la Grèce peut promettre un objectif plus rigoureux encore, c'est grâce en partie à la renégociation réussie en octobre dernier entre l'Union européenne et les banques grecques pour partager la facture du sauvetage du pays. L'objectif de déficit prend en effet en compte l'effacement par les banques de 50% de la dette grecque qu'elles détiennent. En excluant cette mesure, le déficit serait de 6,7% l'an prochain, soit proche de l'objectif initial.

Récession pire que prévue

D'autre part, le nouveau projet de budget prévoit que la Grèce fera face à une récession pire que prévu auparavant, de 2,8% contre 2,5% d'abord calculé. Cela signifie moins de recettes fiscales que prévu, et donc plus de rigueur à venir. En 2011, l'activité a reculé de 5,5%, alors que le FMI tablait en décembre 2010 sur une baisse de l'activité de seulement 3%.
Le nouveau gouvernement de coalition entend convaincre ses partenaires internationaux de sa volonté de redresser les finances publiques grecques. Les inspecteurs du Fonds monétaire international, de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne sont d'ailleurs arrivés ce vendredi à Athènes. Ces institutions internationales réclament un engagement par écrit de tous les grands partis politiques grecs de respecter les termes de l'aide accordée à Athènes en échange de la rigueur. Problème, les conservateurs de Nouvelle Démocratie (ND) refusent de s'engager.

L'objectif raté de 2011

D'autre part, même si le projet de budget est présenté comme très rigoureux, des doutes peuvent subsister sur sa future mise en oeuvre. L'exécution du budget 2011 a ainsi dérapé et l'objectif initial d'un déficit de 7,6% a dû être revu à la hausse à 9%. Et encore : à en croire les chiffres du rapport des finances publiques grecques du mois d'octobre, il faut s'attendre à un déficit de 9,2% à la fin de l'année, selon les calculs des économistes de Barclays Capital.
Certes, la récession est plus grave que prévue et explique des recettes inférieures aux prévisions, reconnaissent ces analystes. Mais la pente des dépenses est inquiétantes, ajoutent-ils : depuis le début de l'année, et malgré toutes les mesures annoncées, le niveau de la dépenses publique n'a quasiment pas bougé.