TOUT EST DIT

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lundi 14 juillet 2014

Hollande et Valls font l’unanimité…

… contre eux ! Le gouvernement réussit ce tour de force d’exaspérer la moitié des syndicats sans pour autant rassurer les chefs d’entreprise.
Il y a quinze jours, Pierre Gattaz a eu la surprise de voir un groupe d’intermittents envahir son bureau. Pas celui de président du Medef, sans doute mieux protégé, mais son bureau de patron de Radiall. Allait-il être pris en otage ? Non, les intermittents étaient venus faire du spectacle : leur projet était de déménager le bureau lui-même pour l’installer à Matignon — sous-entendu : puisque c’est Gattaz qui gouverne, montrons-le ! Le projet n’est pas allé plus loin (quelques policiers ont ramené les fantaisistes à la raison), mais la scène illustre dans quelle impasse le pouvoir s’est engagé.
De l’affaire des intermittents à la conférence sociale de la semaine, on vient de voir les effets d’une politique erratique et incohérente. Le mouvement des intermittents s’est déclenché en même temps que celui des cheminots CGT et Sud-Rail de la SNCF. Côté artistes, Manuel Valls tente la politique du compliment ; côté cheminots, celle du pourrissement. Ici, il dit : “Je prends le dossier”, il propose 40 millions et la “remise à plat” d’un régime exceptionnel ; là, il fait voter la réforme de la SNCF sans y mettre les gants. Va-t-il calmer les intermittents en laissant les cheminots ruminer leur humiliation ?
Le 19 juin, l’Humanité Dimanche le prévient : « Colère sociale, exaspération populaire, ça pète quand ? », avec ce commentaire : « Le pouvoir actuel est en train de s’aliéner des catégories sociales — cheminots, salariés de la culture — traditionnellement acquises à la gauche. » Le problème de Valls (et celui de Hollande) est de vouloir une chose et son contraire. Le déclencheur de l’affaire des intermittents est l’accord de l’Unedic sur l’assurance chômage signé le 22 mars dernier. Le patronat y avait mis un préalable : que l’indemnisation des intermittents soit, sinon réformée, du moins aménagée. Après discussion, la CFDT, FO et la CFTC signent — pas la CGT. Que le gouvernement remette en cause cet accord sous la pression, il dresserait contre lui autant le patronat que les syndicats signataires. Donc, il ne le fait pas ; il nomme un médiateur ! Du coup, il passe pour l’agent du patronat et la CGT le lui fait payer en claquant la porte de la conférence sociale. Pas seule : FO et, signal plus inquiétant, la FSU (enseignants) et Solidaires font de même. Impasse.
La confiance est-elle au moins de retour au patronat ? Pas plus. Et pour de bonnes raisons que Pierre Gattaz, au nom du Medef, et sept autres présidents d’organisations patronales font savoir à Valls et Hollande sous la forme d’un “appel” lancé le 29 juin (dans le JDD) à huit jours de la conférence du palais d’Iéna afin de les mettre en garde : quand on a une croissance zéro, un investissement zéro, un chômage en hausse perpétuelle, c’est que « les actes ne suivent pas les discours ». Alors on attend des « mesures efficaces plutôt que de privilégier la posture ».
La posture, c’est le pacte de responsabilité annoncé le 14 janvier par le président de la République, confirmé aux chefs d’entreprise, répété cent fois et qui n’existera toujours pas le 14 juillet. La posture, c’est la déclaration de politique générale prononcée par le premier ministre le 8 avril, dans laquelle il annonce un vrai plan d’économies — des baisses de charges consenties aux entreprises gagées sur 50 milliards de baisses de dépenses (ce chiffre figurait déjà dans l’intervention de Hollande, le 14 janvier).
Ce plan effraie les socialistes. Valls doit le défendre devant le conseil national de son parti avant même la représentation parlementaire (une première sous cette République). Pour rassurer (en vain) les “frondeurs” de son aile gauche, il multiplie les “gestes”, pour les ménages modestes, les fonctionnaires, l’emploi à domicile, les intermittents ; des mesures dont le Monde calcule l’addition : 4 milliards de dépenses supplémentaires, quand la Cour des comptes précise, dans son dernier rapport, que l’État aura encaissé 15 milliards de moins que ses prévisions de recettes fiscales, soit au total 19 milliards qui manqueront dans les caisses. Sans oublier les 2 milliards nécessaires pour habiller une autre posture, celle de M. Montebourg dans le capital d’Alstom, et la généralisation du tiers payant, présentée par Mme Touraine, qui aggravera encore le déficit de l’assurance maladie. Nous aurons ainsi une belle dette de 2 000 milliards à la fin de cette année.
Le 18 janvier 2012, à quatre mois de la présidentielle, Nicolas Sarkozy réunissait encore à l’Élysée tous les partenaires sociaux, patronat et syndicats ; aucun ne manquait à l’appel, même ceux qui voteraient contre lui. Deux ans et deux mois après sa victoire, François Hollande réussit le tour de force, avec un Manuel Valls qui fête ses cent jours à Matignon, d’exaspérer la moitié des syndicats, sans rassurer le patronat.

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