TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

samedi 9 août 2014

Le lâche abandon des chrétiens d’Orient

Après MossoulKarakosh, la ville qui compte le plus grand nombre de chrétiens en Irak, vient à son tour de tomber le 7 août aux mains des djihadistes de l’Etat islamique. Des dizaines de milliers de chaldéens, menacés de mort, sont obligés de fuir cette cité. Les églises sont occupées, les croix brûlées. Les chrétiens, au nombre de deux millions en Irak au début des années 2000, ne seraient plus que 400 000 aujourd’hui, contraints de vivre dans la terreur. Un phénomène d’épuration ethnique est en ce moment à l’oeuvre dans ce pays. L’inaction de la communauté internationale est incompréhensible. En 1999, une coalition dirigée par les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France avait bombardée la Serbie pendant plusieurs semaines à la suite des exactions commises envers les habitants du Kosovo. Aujourd’hui, la destruction d’une communauté ne suscite que l’indifférence ou bien des réactions sans commune mesure avec la dimension du drame. Les dirigeants politiques montrent une étrange discrétion face au massacre en cours. Aucune opération armée pour venir en aide aux victimes n’est bien entendu envisagée, ni même évoquée en tant que possibilité. Le conseil de sécurité de l’ONU reste coi. Le silence du monde intellectuel et médiatique, des autorités morales promptes à s’indigner du sort des minorités dans le monde est particulièrement assourdissant. Qui parle aujurd’hui du «devoir d’ingérence» de la communauté internationale? Jadis, les chrétiens d’Orient, sous l’Empire ottoman, étaient pourtant des minorités auxquelles l’Europe et la France en particulier accordaient une protection particulière.
Ce lâche abandon a des causes multiples. Le monde occidental qui a largement participé à la déstabilisation de l’Irak, apparaît aujourd’hui comme englué dans sa mauvaise conscience. Le chaos qui est en train de s’installer au Moyen-Orient avec la naissance d’un «califat» jihadiste entre l’Irak et la Syrie, signe son échec cuisant dans cette région du monde. Le silence et l’indifférence actuels du monde occidental portent la marque de la défaite et de la résignation. En outre, aux yeux de l’intelligentsia bien pensante européenne, prendre la défense de chrétiens, même menacés de mort, revêt une connotation «réactionnaire»: «Croisade à droite pour les chrétiens d’Irak» titre un grand quotidien du matin. L’idéologie de la haine de soi – de «l’héritage chrétien» honni – est plus que jamais en toile de fond de ce lâche abandon. Sommet du paradoxe: la bonne conscience humanitaire, devenue sélective, est en train d’engendrer deux catégories d’hommes: ceux qui ont droit à la compassion et à la protection de la communauté internationale, et les autres, chrétiens, qui n’y aurait pas droit tout autant. Les récupérations, amalgames extrémistes en tout genre, destinés à accabler des populations musulmanes en général – qui n’ont strictement aucun rapport avec ce drame – ne font qu’amplifier la confusion et aggraver la paralysie générale. La chute de Karakosh peut elle provoquer une prise de conscience, un sursaut? Le droit d’asile et l’accueil des chrétiens d’Orient en Europe ne constituent en aucun cas une réponse suffisante. Le Moyen-Orient est aussi le berceau des chrétiens qui y sont chez eux, après des siècles de vie en commun et dans l’harmonie avec les musulmans. Ils revendiquent le droit de garder leur maison et d’y résider en paix et en sécurité . Face à un groupuscule dont l’idéologie et les méthodes rappellent les heures les plus sombres de l’histoire, la discrétion du monde occidental renvoie au mot fameux de Winston Churchill: «…vous aurez la honte et la guerre».

L’amateurisme de François Hollande sanctionné à Paris comme à Berlin

Alors que le Conseil constitutionnel vient de retoquer une des mesures phares du Pacte de responsabilité, la chancelière allemande Angela Merkel n’a pas même pas daigné répondre directement à la complainte française assurant que l’Allemagne était responsable de la faiblesse de la croissance en Europe.
Pas de trêve estivale pour François Hollande : dans son exil provisoire à la Lanterne, dans le parc de Versailles, et entre deux commémorations sur la grande guerre de 1914, il peut méditer sur le cafouillage de la politique française. Le Conseil constitutionnel vient une fois de plus, en retoquant une des mesures phares du Pacte de responsabilité concernant le volet social de mettre en cause la mauvaise pratique du pouvoir à jouer avec une des règles fondamentales en matière de fiscalité pour des raisons de basse politique intérieure.
Les Sages rappellent une fois de plus que le gouvernement revient sans cesse à la charge pour tourner les principes réaffirmés régulièrement par le Conseil, en raison de son obsession d’être accusé par sa gauche de favoriser les riches, si ces derniers venaient à bénéficier comme les plus modestes d’un abaissement  de la fiscalité. Pour maintenir l’équilibre précaire entre les fractions de sa majorité et les courants du PS, les sorciers de Bercy sont en effet appelés régulièrement à inventer de nouveaux stratagèmes susceptibles d’être à leur tour censurés et conduisant à un bricolage fiscal d’autant plus insupportable que les règles sont sans cesse modifiées.
Mais le second camouflet enregistré en une semaine par François Hollande est beaucoup plus humiliant parce qu’il émane d’Angela Merkel. Celle-ci n’a pas daigné répondre directement à la complainte française assurant que l’Allemagne, par sa fermeté, était responsable de la faiblesse de la croissance en Europe. Elle a chargé son porte-parole de préciser qu’il n’était nullement question pour Berlin d’apporter le moindre changement à une politique qui porte ses fruits outre-Rhin, alors que certains de ses partenaires manquent cruellement  de courage pour engager les réformes nécessaires à leur redressement. A la France de commencer par régler ses propres affaires et surtout de tenir les engagements pris depuis des années, sans cesse remis en cause en raison de l’absence de résultats. On est désabusé du côté allemand, car on sait bien que la démarche française est d’abord le signal que Paris va demander de nouveaux délais pour ramener sa dette dans les limites des 3% prévues par Bruxelles. Mais on ne veut pas faire un chèque en blanc à un gouvernement qui a perdu toute crédibilité, alors que la cote de popularité du Premier ministre s’effiloche pour glisser progressivement au niveau de celle du président.
La rentrée toute proche s’annonce particulièrement délicate, car le dispositif fiscal est en partie mis en pièces par le Conseil constitutionnel, alors que la moitié des économies annoncées dans le Pacte de responsabilité ne sont toujours pas précisées. Le pouvoir parle toujours de réformes, mais on sent bien qu’au niveau des différentes professions et lobbies de tous ordres, la résistance s’organise à tout changement, car l’idée qu’il puisse y avoir des gagnants et surtout des perdants est insupportable à la majorité de l’opinion. C’est ce qui justifie le slogan de François Hollande de vouloir calmer le jeu, en appliquant la vielle recette issue des moments les plus sombres de la Quatrième république selon laquelle "il n’y a pas de problème qu’une absence de solution ne puisse résoudre".

«Pour nous convaincre à nouveau, Nicolas Sarkozy doit se réinventer en profondeur»

Puisqu'il est désormais acquis qu'il va revenir, Nicolas Sarkozy doit, pour lui comme pour nous, profiter de cette fin d'été pour interroger en profondeur le ressort de sa reconquête.
S'il entend gagner en 2017 et sauver, cette fois, véritablement son pays, il ne peut tout d'abord éviter de domestiquer son pire ennemi, aujourd'hui à la une de tous les médias sous les traits caricaturaux du sacrifice d'un homme prêt, si l'on insiste vraiment, à abandonner sa paisible retraite loin, très loin d'un monde politique qu'il n'a en réalité jamais lâché. Car cet ego utile dans les combats les plus violents l'aveugle malheureusement sur le semi-échec de son premier mandat autant que sur les raisons pour lesquelles une partie de sa première clientèle regarde avec amertume et défiance son retour sur scène.

Cette incapacité de remise en cause, dont Paris bruisse mais dont personne n'ose lui parler, l'illusionne jusqu'à la qualité de la campagne 2012, qu'il considère, hélas, comme sa «meilleure campagne». Si le mal est structurel, Nicolas Sarkozy ne tirera aucune leçon de ses erreurs et sera un mauvais candidat et, s'il gagne, un mauvais président. Si, comme on peut l'espérer, il parvient à s'en défaire, alors tout est permis, y compris le meilleur, et justifie qu'on lui signale, dût-il provisoirement en prendre ombrage. C'est même là un service sincère à lui rendre car c'est à lui qu'incombe la charge de la preuve sur un terrain qu'il ne soupçonne apparemment même pas. Au-delà des quelques milliers de militants de l'UMP qui l'éliront comme un seul homme, il existe une armée d'électeurs orphelins qui pourraient bien, demain, faire ou défaire son élection. Gare, donc, à trop jouer la confiance, le vote utile et le rejet évident du président en place. L'heure est trop grave pour ne pas aller chercher, «avec les dents», un véritable mandat réformiste.
Pour nous convaincre à nouveau, Nicolas Sarkozy doit se réinventer en profondeur. Sur la vision, l'amplitude réformiste, l'attitude et la méthode d'action.
Sur le fond, un seul thème émerge de ce retour au suspense digne d'un polar mal ficelé: la différence. «Les socialistes voient toute différence comme une injustice. Moi, je vois toute différence comme une richesse. Jusqu'à présent, la droite attaquait l'égalité par la liberté. C'était une erreur d'analyse. Car c'est toujours perçu comme la liberté du fort sur le faible. Il faut au contraire attaquer l'égalitarisme par les différences», vient-il d'affirmer. De cela, le meilleur comme le pire peut émerger. Le drame serait un mauvais remake de l'étale chiraquien mixé avec le refus congénital de Nicolas Sarkozy de mettre en œuvre, dès 2007 et avant même l'explosion de la crise, la «rupture» authentique pour laquelle il avait pourtant recueilli plus de 53 % des suffrages.
L'éloge de la différence peut toutefois se décliner positivement en définissant un cap authentiquement réformateur, tirant pleinement les leçons d'un concept oublié: l'inégalité juste. Si la France meurt effectivement de son tropisme égalitariste, la réduction décomplexée, sur un temps court et de manière durable et sécurisée, de la progressivité de l'impôt, y compris et surtout sur les personnes et les sociétés les plus riches, les plus innovantes et les plus ingénieuses, ressuscitera en un instant l'envie de se démarquer et de créer, chez nous, la croissance et la compétitivité que l'on incite à déployer hors de nos frontières. Dans le même esprit, l'assouplissement réel du droit du travail, la fin définitive du syndicalisme non représentatif, l'abolition réelle des rentes et des privilèges publics recréeront les bonnes incitations à se dépasser et à se distinguer, pour éventuellement gagner plus, vivre mieux et ambitionner, à l'arrivée, une différence saine et valorisante, car fondée sur l'effort et l'inventivité. Même s'il s'en défendra dans un premier temps, alors que le pays est plus que jamais prêt à entendre ces vérités, Nicolas Sarkozy se convertirait alors, enfin, à l'authentique éthique de la liberté, à l'opposé du renard dans le poulailler, qui donne à chacun la chance de réussir et brise les rigidités de l'actuelle lutte des places. 
Autre point à travailler: la France a la religion du changement mais la phobie des réformes. Pour beaucoup de gens, seules les révolutions permettent les ruptures profondes. Nos dirigeants successifs, véritables cyniques du choix politique, miment donc la réforme mais comptent, dans les faits, sur l'explosion imminente de la Cocotte-Minute budgétaire, sociale et religieuse pour basculer enfin, contraints et forcés, vers une réinvention complète de notre modèle social. Ils oublient pourtant qu'en France comme en Russie, qui ont toutes deux été un État avant d'être une nation, il n'y a rien de plus conservateur qu'une révolution. La Révolution française comme la révolution communiste en attestent. S'il ambitionne de nous sauver d'une chute magistrale, Nicolas Sarkozy doit donc mobiliser toute son énergie de conviction au soutien d'une idée forte: la réforme profonde, la vraie, celle qui n'a jamais vu le jour sous la Ve République, celle qui a sauvé tant de pays et nous évitera la révolution destructrice appelée par nos nouveaux jacobins.
Ces derniers, à la gauche de la gauche et, plus encore, à la droite de la droite, seront des adversaires redoutables. Pour résister à la tentation du braconnage sur leurs terres démagogiques et mal inspirées, l'ancien président doit aller à la rencontre des nouveaux défis de ce monde, dans lequel des emplois de millions de cadres seront peut-être remplacés par la puissance de l'intelligence artificielle mariée au génie de l'algorithme et à la perfection des nouveaux robots. Imperceptibles à la table des chefs d'État comme devant un parterre de banquiers, ces déplacements tectoniques plus impressionnants encore que la révolution industrielle et incroyablement bénéfiques s'ils sont savamment appréhendés, n'intéressent pour le moment aucun prétendant à l'Élysée. C'est à cette réflexion profonde, pensant la France dans le concert des mutations, qu'il doit désormais se consacrer.

Dérapage, dévissage, lessivage…

Dérapage, dévissage, lessivage…

Et un ratage de plus pour le gouvernement ! Mercredi, le Conseil constitutionnel, saisi par l’UMP, a censuré une partie du pacte de responsabilité compris dans la loi de financement rectificatif de la sécurité sociale, adoptée définitivement le 25 juillet dernier. Ennuyeux pour le gouvernement, puisque cette partie censurée contenait les mesures dites de « compensation sociale du pacte » dont se glorifiait Manuel Valls : « Ce pacte de responsabilité est aussi un pacte de solidarité. » Eh bien, il ne l’est plus ! « Les baisses dégressives de cotisations pour les salariés touchant entre 1 et 1,3 fois le smic » ont été jugées « contraires à la Constitution, car à l’encontre du principe d’égalité devant la loi ». Encore un texte mal fichu et mort-né accroché au palmarès déjà bien rempli de ce gouvernement de branquignoles. Hollande recadré de nouveau. Avec en retour, pour lui et pour Valls, un effet politicien fâcheux : cette censure redonne du souffle aux « frondeurs » du PS, opposés à ce pacte et qui réclament maintenant « sa remise à plat ». On efface tout et on recommence ?

D’un ratage l’autre…
D’un ratage l’autre, Hollande n’en finit plus de se ratatiner. Par exemple avec le budget 2014. Celui-ci avait été élaboré sur une croissance prévisionnelle de 1%. Las ! Le ministre des Finances, Michel Sapin, estime à présent que si l’on atteint les 0,5%, « ce sera déjà bien ». Un embryon de croissance, en somme. Mais l’embryon n’est-il pas destiné à se développer ? Donc, avec 0,5%, la croissance aperçue à plusieurs reprises par François Hollande, à travers ses lunettes embuées, sera tout de même là. Suffit d’attendre qu’elle pousse. Qu’elle s’accroisse. En l’arrosant peut-être avec des taxes ? Et les larmes des chômeurs ?
Mais le monde, lui, ne nous attend pas. La situation est d’autant plus scabreuse pour l’actuel gouvernement que la reprise tant espérée se manifeste, à des degrés divers, un peu partout en Europe. La Grande-Bretagne, qui n’est pas dans l’euro, « caracole en tête de tous les pays développés », avec une croissance sur le point de dépasser cette année les 3%. L’Allemagne maintient un rythme annuel très régulier autour de 2%. Avec, dans certains Lander, comme par exemple la Bavière, quasiment le plein-emploi. (Plus de 10% de chômage en France). Les autres pays de la zone euro, où la croissance demeure certes anémiée, enregistrent néanmoins quelques frémissements. Sauf en France, où les seuls frémissements constatés sont des frémissements d’effroi devant les résultats désastreux du gouvernement socialiste. La France en décalage croissant avec les autres pays industrialisés…
Les géniteurs du budget 2014 prévoyaient également « une hausse des prix de 2% ». Elle ne sera finalement que de 0,5%. Aussi atrophiée que les chiffres de la croissance. Résultat : « un manque à gagner d’un certain nombre de milliards de rentrées fiscales ». Vite, de nouvelles taxes pour boucher les trous !
Et les autres nouvelles sur le front, enfoncé de toutes parts, de l’économie, ne sont pas plus réjouissantes. Selon les dernières prévisions budgétaires de Bercy, les déficits français atteindraient 4,4%, au lieu des 3,5% prévus. « Quant à la dette publique de la France, elle ne devrait pas tarder à franchir la barre symbolique des 2 000 milliards d’euros. » Déficit, dette, chômage… Nos seuls records olympiques.
Souvent prompt à mettre les drapeaux en berne, le chef de l’Etat devrait saisir cette nouvelle occasion. Du moins en ce qui concerne les drapeaux du palais de l’Elysée, de l’hôtel Matignon et du ministère de Bercy.
Décalage, rafistolage, pourrissage, dévissage, naufrage… Ce sont les maux dont souffre l’économie française en plein barbotage et les mots pour les exprimer. Avec, à l’atterrissage, le ratissage et le lessivage des contribuables français. Et la rage grandissante de ces derniers…
Quoi de neuf ? Le retour de Sarko
Et puis, dans ce marécage où nous nous enfonçons, un glougloutement politicien : le énième épisode du feuilleton Sarkozy, avec toujours cette question existentielle : être ou ne pas être candidat le 29 novembre prochain, à la présidence de l’UMP ? Sarko nous avait dit qu’il donnerait sa réponse début septembre. Mais il n’a apparemment pas pu garder le silence jusque-là. Dans un entretien à Valeurs Actuelles (sollicité par lui), l’ancien chef de l’Etat explique « qu’il n’a pas encore pris sa décision ». Bien la peine de convoquer des journalistes pour un tel scoop. Mais cette interview pour ne rien dire entre sans doute dans sa stratégie des « cartes postales » ? Celle-ci étant, semble-t-il, plus particulièrement destinée à ses concurrents Hervé Mariton et Bruno Le Maire. « Que l’on parle de mon retour en politique, c’est déjà miraculeux en soi. Cela veut dire que cette idée du retour est inscrite dans les têtes et les esprits. » Et sur son agenda politique. Conclusion : « A partir de ce moment-là, une très grande partie du chemin est faite. » Mariton, Le Maire, cassez-vous, pauvres con… currents ! Le chef est de retour…
Dans cette France qui s’ensauvage, où l’on assiste à Calais à des rixes féroces entre migrants soudanais et érythréens, où entrent Africains et Afghans – de quoi remplir un peu plus nos hôpitaux déjà surchargés d’immigrés – (voir Présent d’avant-hier), une phrase d’un témoin de cette immigration-submersion est à retenir. « Le cœur du problème, c’est qu’ils sont chaque mois plus nombreux. Avec la chute de l’Etat libyen, un nouveau couloir migratoire, en provenance de l’Afrique, s’est ouvert vers l’Europe. » La chute de l’Etat libyen ? Merci Sarko ! Le décrochage de François Hollande ne fait en somme que succéder au sabotage de son prédécesseur… 

Millefeuille administratif ou subsidiarité ?

Le principe de subsidiarité doit guider la véritable réforme territoriale à venir.

Voici une caricature de l’époque prérévolutionnaire qui montre un homme du pauvre peuple portant sur ses épaules un membre du clergé et un noble. Eh bien depuis cette époque, la situation n’a fait qu’empirer. Aujourd’hui, voici les parasites qui pèsent sur les épaules du malheureux citoyen.
  • L’État (président de la république, gouvernement, parlement).
  • 27 Régions
  • 101 Départements
  • 342 Arrondissements
  • 4 052 Cantons
  • 36 646 communes
Le problème n’est pas tant le nombre d’échelons, encore qu’il gagnerait beaucoup à être diminué, que l’éparpillement des responsabilités et des financements. Chaque échelon a quelque chose à dire sur n’importe quelle activité économique ou sociale. Il en résulte une dilution des responsabilités et la nécessité de passer par plusieurs échelons pour obtenir la moindre autorisation de faire quelque chose, d’où une augmentation des délais et des coûts nécessaires pour accomplir n’importe quelle activité nouvelle.
La dilution des responsabilités
René Millefeuille administratifAinsi, au moins huit services s’occupent du marais poitevin : l’État, deux régions, trois départements, l’agence de l’eau Loire-Bretagne et le conservatoire de l’espace littoral. Un dossier quelconque d’investissement consacré au marais traînera d’un service à l’autre, chacun ajoutant son grain de sel, s’il ne fait pas appel à un bureau d’études. Dans un autre genre, Besançon compte trois offices du tourisme, un pour la ville, un pour le département et un pour la région. De tels exemples sont innombrables.
En outre, toute activité nouvelle voit son financement partagé entre plusieurs échelons, ce qui diminue la responsabilité de chacun et ne clarifie pas l’utilisation de leurs ressources. Ainsi, ma sympathique communauté de communes d’Aire sur l’Adour vient d’achever une médiathèque. 60% du coût total a été financé par des subventions de l’État, de la région Aquitaine et le département des Landes. On se demande en quoi chacune de ces entités est en mesure d’apprécier la pertinence du projet.
Une autre cause de la croissance des dépenses des collectivités locales est l’irresponsabilité fiscale qui fait qu’en moyenne, la part d’un projet d’investissement supportée directement par les contribuables d’une collectivité est de l’ordre de 25 à 30% de la dépense totale, l’État intervenant au nom de la péréquation.
La première des choses à faire pour améliorer le système serait donc de donner à chaque échelon une responsabilité unique et totale sur une activité donnée, financée exclusivement par les impôts levés par cet échelon. Accessoirement, cet exercice permettrait de décider beaucoup plus facilement quel échelon pourrait être supprimé.
Que personne ne croie que ce soit facile : c’est l’une des choses que préconisait la commission initiée par Sarkozy en 2008 et présidée par Balladur, mais les égoïsmes et la soif de pouvoir des élus locaux en ont eu rapidement raison.
Le coût du personnel
Un second inconvénient du système actuel est son coût en personnel, qu’aucune barrière ne limite, car le contribuable ne voit guère le rapport entre ce qu’il paie comme impôts et le coût des élus comme du personnel que ces élus recrutent sans aucune sanction.
Commençons par le nombre de ministres. Aux États-Unis, ils sont 15, correspondant chacun à un « département » (l’équivalent d’un ministère), dont le nombre ne varie pratiquement pas, car chacun représente l’une des fonctions éternelles de l’État qui sont : les Affaires étrangères, le Trésor, la Défense, la Justice, l’Intérieur, l’Agriculture, le Commerce, le Travail, la Santé et les Services sociaux, le Logement et le Développement urbain, les Transports, l’Énergie, Secrétaire l’Éducation, les Anciens combattants et la Sécurité intérieure (Homeland Security, le plus récemment créé, à la suite des attentats du 11 septembre).
Sous chaque présidence, il y a eu des ministres qui viennent de l’entreprise, de la Finance ou de l’Armée. Tout le monde se souvient de McNamara, président de Ford, nommé ministre de la Défense sous deux présidents, ou plus récemment de Colin Powell, chef d’État-Major des armées, nommé ministre des affaires étrangères sous George  W. Bush Jr.
En France, le nombre de ministres varie de 15 (pour deux courtes périodes, une sous Raymond Barre, une sous Nicolas Sarkozy) à une quarantaine. Ils ont parfois des dénominations ridicules, comme ministre du développement durable. Les ministres sont nommés non pour leur compétence, mais pour satisfaire des hommes ou des femmes politiques influents. Ils ne viennent jamais de l’entreprise, de la Finance ou de l’armée.
Nous avons ensuite :
  • Sénateurs : 348 (aux États-Unis il n’y en a que 100 pour 5 fois plus d’habitants)
  • Députés: 577 (435 aux États-Unis)
  • Conseillers régionaux : 1 880
  • Conseillers généraux: 4 052
  • Présidents de communautés et syndicats de communes: 16 750
  • Vice-présidents: 100 000
  • Maires : 36 646
  • Adjoints aux maires : 100 000
  • Conseillers municipaux : 526 000, mais ces derniers ne coûtent rien.
Ajoutons qu’aux États-Unis environ 40% des parlementaires sont des chefs d’entreprise, contre 4% en France. Sans tenir compte des 74 députés européens, ni des 233 membres du Conseil économique, environnemental et social, parce qu’ils ne sont pas dans la hiérarchie ci-dessus. L’existence de ce dernier conseil, que l’on trouve aussi dans chacune des régions, est un superbe exemple de la façon dont le pouvoir gaspille nos deniers et le temps de gens de valeur en palabres et rapports sans résultats tangibles. Pour réformer le système, il y a deux façons de concevoir l’affectation des responsabilités à chacun des échelons: la façon constructiviste, autoritaire et descendante qui a toujours été celle de l’État français, et la façon libérale ascendante connue sous le nom de subsidiarité.
Le principe de subsidiarité
Ce dernier principe a été défini dans l’encyclique « Quadragesimo anno » du pape Pie XI, en 1931 :
De même qu’on ne peut enlever aux particuliers, pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de s’acquitter de leur seule initiative, et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps que troubler de manière très dommageable l’ordre social, que de retirer aux groupements d’ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste, et d’un rang plus élevé, les fonctions qu’ils sont en mesure de remplir eux-mêmes (…) Que l’autorité publique abandonne donc aux groupements de rang inférieur le soin des affaires de moins d’importance où se disperserait à l’excès son effort ; elle pourra dès lors assurer plus librement, plus puissamment, plus efficacement les fonctions qui n’appartiennent qu’à elle, parce qu’elle seule peut les remplir.
L’approche constructiviste est si naturelle en France, que c’est celle qu’emploient même deux associations libérales amies pour lesquelles j’ai une grande admiration, voire une véritable affection. L’Ifrap et l’IREF. L’approche libérale n’a pour l’instant que deux militants connus : Jacques Gautron et moi. J’espère qu’il y en aura davantage à la fin de cet exposé. Ceci dit, il est clair que l’approche constructiviste permettra d’obtenir des progrès plus rapidement que l’approche libérale, vu la mentalité dominante des Français, mais cet exposé a pour ambition de faire évoluer cette mentalité, car l’utilisation du principe de subsidiarité gardera son intérêt lorsque la méthode constructiviste aura réussi à simplifier le millefeuille.
La différence la plus radicale entre les deux approches concerne le nombre de communes. L’approche constructiviste considère qu’il y en a beaucoup trop, mais au fond, sa motivation plus ou moins consciente est la simplification du travail de l’État, lequel envoie ses directives jusqu’à la mairie du plus petit village. Et des directives, il y en a beaucoup : en moyenne au moins une par semaine. Nous donnerons plus loin des exemples de leur nocivité.
L’approche libérale, animée par le principe de subsidiarité, considère que beaucoup de choses peuvent se faire beaucoup mieux et de manière plus pertinente au niveau des communes. Elles sont plus adaptées aux circonstances locales et elles évoluent favorablement grâce aux comparaisons qui se font d’un village à l’autre.
L’esprit communal
Frédéric Bastiat
Frédéric Bastiat
Parmi les 36 646 communes, que compte la France, il y en a environ 28 000 ayant moins de 1000 habitants, totalisant 14 millions d’habitants et 9 millions d’électeurs. Or dans une commune de moins de 1000 habitants, tout le monde se connait directement ou indirectement, et il en résulte cinq avantages absolument décisifs :
  • L’entraide règne.
  • Il n’y a pratiquement pas de vols, de meurtres ou de violences.
  • Le maire est abordable.
  • Le maire est élu pour ses capacités et non en fonction de ses inclinations politiques.
  • Les mesures collectives sont prises en fonction de la réalité et non des idéologies plus ou moins fumeuses des hommes au pouvoir. Elles sont donc beaucoup plus adaptées aux besoins réels des habitants.
J’ai vérifié ces avantages, d’une part dans la commune de 430 habitants dont j’ai été le maire, d’autre part dans la tour Défense 2000, à Puteaux, qui héberge un millier d’habitants de 22 nationalités sur 52 étages. Les premières années, les habitants s’ignoraient, il y avait des détritus jetés par les fenêtres, des dégradations, voire des vols. On m’a demandé de prendre la tête du Conseil Syndical. J’ai alors cherché à comprendre pourquoi il existait une telle différence entre la tour et mon village et j’ai fini par comprendre : dans la tour, les gens s’ignoraient les uns les autres. J’ai alors créé un petit périodique que j’ai nommé « Le Village Vertical », auquel j’ai fait participer divers volontaires, et grâce auquel j’ai donné des nouvelles sur la vie dans la tour, annoncé des réunions, et last but not least, incité les gens à se dire bonjour dans l’ascenseur. Et la tour est devenue civilisée malgré ses 22 nationalités.
En écrivant l’histoire de mon village (celui des Landes), j’ai pris la mesure de tout ce qui était accompli et financé localement au début du siècle dernier. J’ai pris aussi la mesure de tout ce que le pouvoir central s’est approprié depuis, et la perte d’efficacité et de qualité qui en a résulté. Je vais prendre pour exemple la solidarité, la santé et l’instruction.
Aussi loin que l’on remonte dans les archives du Conseil municipal, il a existé dans la commune un Bureau de bienfaisance. Il se composait de 6 membres. Il était présidé par le maire, et son secrétariat était assuré par le secrétaire de mairie. Les quatre autres membres étaient élus par le Conseil, mais ne faisaient généralement pas partie du Conseil. Il se réunissait le 1er dimanche de chaque mois, à 7h du matin !
Ce Bureau de Bienfaisance examinait cas par cas les demandes d’aide et adaptait cette aide à la situation du demandeur. Les attributions étaient de diverses natures et elles étaient adaptées aux besoins de chaque cas. Elles pouvaient être en argent, en distribution périodique de bons de pains, ou en assistance médicale gratuite. La commune versait un forfait annuel à un médecin, lequel venait visiter gratuitement les malades dans le besoin. Le bureau se coordonnait avec des institutions de bienfaisance privées départementales ou nationales, telles que Le Relèvement des malheureux, L’Assistance par le travail, L’amélioration de l’hygiène des familles pauvres, La protection des enfants du premier âge. Le Bureau tenait une comptabilité rigoureuse de toutes ses actions.
Société de secours mutuel
reforme-territoriale
En 1890, les habitants de la commune se sont dotés d’une Société de secours mutuel. La différence avec le Bureau de bienfaisance est qu’il s’agissait d’une assurance. Ses membres payaient une cotisation annuelle et la Société leur venait en aide en cas de maladie, elle leur payait une petite retraite et soulageait leur famille en cas de décès. Précisons qu’à l’époque, la commune avait 750 habitants.
La société bénéficia de l’expérience déjà acquise par d’autres communes qui s’étaient lancées beaucoup plus tôt. Frédéric Bastiat écrivait en effet dès 1850 :
J’ai vu surgir spontanément des sociétés de secours mutuel, il y a plus de vingt-cinq ans parmi les ouvriers et les artisans les plus dénués, dans les villages les plus pauvres du département des Landes [ …] Dans toutes les localités où elles existent, elles ont fait un bien immense. Les associés s’y sentent soutenus par le sentiment de la sécurité, un des plus précieux et des plus consolants qui puissent accompagner l’homme dans son pèlerinage ici-bas. De plus, ils sentent tous leur dépendance réciproque, l’utilité dont ils sont les uns pour les autres; ils comprennent à quel point le bien et le mal de chaque individu ou de chaque profession deviennent le bien et le mal communs; […] enfin ils sont appelés à exercer les uns sur les autres cette surveillance vigilante, si propre à inspirer le respect de soi-même, en même temps que le sentiment de la dignité humaine, ce premier et difficile échelon de toute civilisation.
L’esprit de notre Société était parfaitement décrit par les lignes ci-dessus.
D’après les statuts de 1890, la société avait pour objet :
  • de payer aux malades une indemnité pendant la durée de leur maladie,
  • de constituer une caisse de pensions viagères de retraite,
  • de pourvoir aux funérailles.
Comme l’indiquait Bastiat, l’adhésion à la Société exigeait un comportement responsable : les statuts précisent : « Aucun secours n’est dû pour les maladies causées par la débauche ou l’intempérance, ni pour les blessures reçues dans une rixe, lorsqu’il est prouvé que le membre participant a été l’agresseur, ni pour les blessures reçues dans une émeute à laquelle il aura pris une part volontaire, ni lorsque le membre participant est atteint de petite vérole s’il ne justifie pas qu’il a été vacciné » !
La création de la Sécurité Sociale après la fin de la Guerre 45 a tué le Bureau de bienfaisance et l’essentiel de la Société de secours mutuel. Jusqu’en 1999, il ne restait à cette dernière que les enterrements, ce qui était tout de même assez précieux car cela garantissait :
  • l’égalité devant la mort,
  • le soutien moral et une indemnité versée aux familles endeuillées,
  • la participation aux obsèques de toute une communauté.
La société payait les fossoyeurs et assurait le transport du défunt depuis son domicile.
Mais à partir de 1999, l’État jugea bon de réglementer les enterrements. Même les fossoyeurs durent être agréés ! Les habitants de la commune durent prendre une entreprise de pompes funèbres homologuée pour faire la fosse, transporter le corps et le mettre dans la tombe. Ces opérations sortirent donc du domaine de la société. Seule demeure la participation aux obsèques et une somme d’argent est toujours versée par la Société à la famille du défunt.
Les visiteurs de quartier jouent un rôle capital dans l’organisation : ils allaient autrefois rendre visite aux malades et leur portaient les indemnités. Aujourd’hui comme autrefois, ils se rendent dans les familles des défunts et informent les membres de leur quartier de la date et du moment des obsèques.
Entraide et assurance mutuelle décentralisées
bureaucratie credits Harald Groven (licence creative commons)Comme on le voit, l’entraide et l’assurance mutuelle existaient dans les communes bien avant l’invention de la Sécurité sociale. Étant décentralisées, elles étaient efficaces, peu vulnérables aux fraudes et ne laissaient tomber personne.
Ce n’est qu’en 1833 que la loi Guizot imposa aux communes de plus de 500 habitants de financer une école de garçons. Ce n’est qu’en 1867 que cette disposition fut étendue aux filles. Enfin, ce n’est qu’en 1881 et 1882 que les lois Ferry instituèrent l’enseignement primaire public gratuit, laïc et obligatoire.
Mais les communes n’avaient pas attendu l’État pour instruire leurs enfants.
Au moyen âge, un des premiers soins d’une paroisse était de désigner un « Régent » – on dirait aujourd’hui un instituteur – pour apprendre aux garçons à lire, écrire, compter et prier Dieu. Choisi par les habitants, ces derniers s’engageaient à le loger et le nourrir à tour de rôle. Il était payé par la commune. Les écoles étaient quelque peu payantes. Bien entendu, il y en a toujours eu un dans ma commune.
Vous avez toutefois remarqué que ledit régent ne s’occupait que des garçons. Dans ma commune, l’enseignement des filles fut assuré à partir de 1869 par des religieuses. Cette année-là, grâce à des dons particuliers, un couvent fut ouvert par trois religieuses venues d’une autre paroisse. Elles furent accueillies avec enthousiasme par la population. Vouées à l’enseignement et à l’éducation des enfants, les religieuses se mirent immédiatement à l’œuvre avec intelligence et dévouement. Les résultats ne se firent pas attendre. On remarqua bien vite que les jeunes filles élevées à l’école des bonnes sœurs avaient acquis une urbanité, une politesse exquise et simple, un maintien réservé et des habitudes de travail. Leur influence continuait lorsque les jeunes filles ayant quitté l’école, venaient leur rendre visite le dimanche entre les offices de la paroisse.
Vers 1880, l’administration de l’instruction publique fit le siège de la commune et des religieuses pour les engager à accepter le titre d’institutrice communale, leur faisant valoir que c’était le seul moyen d’empêcher la création d’une école communale dirigée par une institutrice laïque. Les religieuses, après consultation de leur hiérarchie, résistèrent d’abord, mais comme c’était pour elles une question de vie ou de mort, elles finirent par accepter, en 1882, de devenir institutrices communales.
Alors, allez-vous me dire, c’est très bien de conserver les 28 000 communes de moins de 1000 habitants, mais que faire des 8 646 autres. Je vous répondrai qu’il serait bon de renforcer chez elles la notion de quartiers, de façon à développer chez les habitants d’un quartier un sentiment d’appartenance et de solidarité. Quelques maires l’ont fait. Mais il vaut mieux ne pas attendre que ce soit fait partout pour simplifier le millefeuille administratif.
À vrai dire, quelle que soit la taille des communes, rien ne les empêche de s’associer entre elles pour créer une école, un lycée, une université, un aéroport, etc. Rien ne les empêche non plus de faire exploiter ces entités par des sociétés privées. Leurs associations se borneraient alors à les contrôler.
En poussant ce schéma, on voit que la France pourrait se composer d’associations de communes et d’un État limité à ses fonctions régaliennes, plus peut-être la gestion des routes et du réseau ferré (je dis bien du réseau et non de la SNCF), pour éviter des duplications coûteuses. Dans ce schéma, les impositions se feraient au niveau de la commune, ce qui introduirait un sens des responsabilités bien plus grand dans le choix des participations aux projets intercommunaux.
Je ne me fais aucune illusion sur les chances de voir se réaliser un tel schéma dans notre pays, et il vaut mieux dans l’immédiat réduire le mille feuilles de façon constructiviste que de ne rien faire, à condition toutefois de conserver toutes les communes. Mais il est bon d’orienter les réflexions sur un processus de subsidiarité. Après tout, lorsqu’on a bien compris l’intérêt du schéma, il est possible de faire des pas dans ce sens.
Communautés de communes
Il y a quelques années, un pas original et intéressant a été franchi avec la création des communautés de communes. L’adhésion à une telle communauté est volontaire, et les communes décident librement des activités qu’elles mettent en commun. Ainsi, la communauté de communes d’Aire sur l’Adour, à laquelle appartient ma commune, a été créée en 1992. Au départ, elle comprenait 12 communes du département des Landes. Puis 5 communes voisines du département du Gers ont demandé à en faire partie. 5 autres communes du Gers ont demandé à en faire partie dans un deuxième temps. Elle regroupe donc maintenant 22 communes.
Les activités mises en commun ont été d’abord
  • la voirie
  • l’aménagement de l’espace
  • le développement économique
Puis au fil des années s’est ajouté :
  • la protection de l’environnement
  • le tourisme
  • la collecte et l’élimination des déchets
  • l’Établissement pour les personnes âgées dépendantes (EPAD).
Aucune de ces activités ne pouvaient être sérieusement entreprises au niveau de la commune et tout le monde se félicite de leur mise en commun. Notons qu’au sein même de cette communauté, plusieurs communes voisines ont créé une école communautaire, ce qui a permis aux enfants d’avoir un instituteur par classe, au lieu d’un seul pour toutes les classes et de se doter de moyens informatiques.
Ce courant, pour une fois libéral, a pris une certaine importance en France, puisqu’il existe aujourd’hui :
16 756 Intercommunalités, dont :
  • 2223 communautés de communes
  • 228 communautés urbaines
  • 14305 syndicats intercommunaux
Le modèle libéral, fondé sur la subsidiarité n’est donc pas de la pure utopie. Il fonctionne très modestement en France, mais parfaitement en Suisse. Dans ce pays remarquable, il n’y a que trois niveaux :
  • La commune
  • Le Canton
  • L’État confédéral.
Les cantons jouissent d’une grande autonomie. Ils ont leur propre parlement. Ils jouissent de droits étendus dans les domaines de l’éducation, de la santé publique, de la police du commerce, de l’aménagement du territoire, du maintien de l’ordre public et de l’organisation judiciaire. Les communes se différencient par conséquent fortement d’un canton à l’autre, non seulement par leur taille mais aussi par leur structure administrative et politique ainsi que par les tâches qu’elles accomplissent. Communes et Cantons ont d’importantes compétences en matière fiscale (30% des dépenses publiques sont financées par les communes, 35% par les cantons contre 35% par la Confédération).
Entre l’État confédéral et les cantons, il existe une concertation quasi permanente et la Confédération prend régulièrement l’avis des gouvernements cantonaux. L’article 3 de sa constitution est ainsi rédigé :
Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la constitution fédérale, et, comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral.
Le mot le plus important de ce texte est le mot « délégués ». Tout pouvoir exercé par l’État Fédéral est un pouvoir délégué par les cantons, ce qui est l’essence même de la subsidiarité.

Cet article est une communication présentée au Cercle Bastiat dans le cadre du « week end de la liberté ».

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